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Philosophie féline : les chats et le sens de l'existence
John Gray
- Gaïa
- Litterature Etrangere Gaia
- 5 Octobre 2022
- 9782330171865
Philosopher ne sert à rien. Pour être heureux : inspirons-nous des chats. Depuis la nuit des temps, de nombreux penseurs ont cherché des moyens d'accéder au bonheur et à la tranquillité de l'âme. Aucun n'a vraiment réussi et l'épineuse question de savoir comment vivre continue de susciter la même angoisse.
Les chats n'ont pas ce genre de problème. Obéissant à leur nature, ils se satisfont de la vie que celle-ci leur donne. Dans ce petit ouvrage aussi éclairant qu'amusant, John Gray nous montre que nous pouvons apprendre, grâce à ces remarquables animaux, pourquoi notre quête fébrile du bonheur est vouée à l'échec.
«Pourquoi les humains ne peuvent-ils pas davantage être comme les chats ? C'est la question posée par ce saisissant patchwork de philosophie, de fiction, d'histoire et de récit personnel. Un merveilleux mélange de légèreté et de profondeur, de rigueur et de tendresse, d'esprit et de lamentation.» Jane O'Grady, Daily Telegraph -
Là où Joan Baez a pris le micro dix ans plus tôt pour appeler à lutter contre la censure et en faveur de la liberté d'expression. Là où les représentants officiels de la Beat Generation - William Burroughs, Jack Kerouac, Allen Ginsberg, Lawrence Ferlinghetti, Neal Cassidy. - annoncèrent l'avènement de la révolution psychédélique. Steve Abbott découvre une ville en pleine effervescence dans laquelle la communauté gay se bat pour ses droits, il rejoint la scène littéraire de l'époque et fréquente cette génération de jeunes gens bien décidés à tout vivre, tout expérimenter. Commence pour le duo père-fille une vie de bohème, ponctuée de déménagements, de fêtes et de lectures de poésie à l'arrière des librairies. Alysia Abbott raconte son enfance alors que le virus du sida ronge peu à peu la ville.
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La présentation de Stefan Zweig s'ouvre sur un Tourgueniev moribond qui, du fond de sa couche, rédige quelques mots à l'attention de Tolstoï pour le supplier de reprendre la plume (« Revenez à la littérature ! C'est votre don véritable. Grand écrivain de la terre russe, entendez ma prière ! »). Avec cette scène inaugurale, Zweig amène aussitôt le lecteur au moment clé de la biographie de Tolstoï : vers sa cinquantième année, l'écrivain russe est victime d'un ébranlement intérieur qui va le pousser à rechercher sans fin, chez les philosophes d'abord, puis dans la religion, le sens caché de la vie. Zweig ne cache pas son admiration pour celui qui s'est alors donné pour mission de se sauver lui-même, et toute l'humanité avec.
« Tout homme d'état, tout sociologue découvrira dans sa critique approfondie de notre époque des vues prophétiques, tout artiste se sentira enflammé par l'exemple de ce poète puissant qui se tortura l'âme parce qu'il voulait penser pour tous et combattre par la force de sa parole l'injustice de la terre. » -
Que raconte White, première expérience de « non-fiction » pour Bret Easton Ellis ? Tout et rien. « Tout dire sur rien et ne rien dire surtout » pourrait être la formule impossible, à la Warhol, susceptible de condenser ce livre, d'en exprimer les contradictions, d'en camoufler les intentions. White est aussi ironique que Moins que zéro, aussi glaçant qu'American Psycho, aussi menaçant que Glamorama, aussi labyrinthique que Lunar Park, aussi implacable que Suite(s) impériale(s). Loin des clichés toujours mieux partagés, plus masqué que jamais, Bret Easton Ellis poursuit son analyse décapante des États-Unis d'Amérique, d'une façon, comme il le dit lui-même, « ludique et provocatrice, réelle et fausse, facile à lire et difficile à déchiffrer, et, chose tout à fait importante, à ne pas prendre trop au sérieux ».
Que raconte White en ayant l'air à la fois de toucher à tout et de ne rien dire ? Peut-être que le fil à suivre est celui du curieux destin d'American Psycho, roman d'horreur en 1991 métamorphosé en comédie musicale à Broadway vingt-cinq ans plus tard. Ellis a dit autrefois : « Patrick Bateman, c'est moi. » Il ne le dit plus. Et si Patrick Bateman était devenu président ?
P.G.
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Le scandale du siècle : écrits journalistiques
Gabriel García Márquez
- Grasset
- Litterature Etrangere Grasset
- 16 Novembre 2022
- 9782246819622
Le journalisme a été la grande affaire de la vie de Gabriel Garcia Marquez. Ses années de formation ont été consacrées au métier de reporter qu'il exerçait avec une passion jamais démentie, et son oeuvre littéraire en découle dans une filiation revendiquée par lui. La présente anthologie rassemble donc 50 textes de la période journalistique de l'homme qui recevra le Prix Nobel de Littérature en 1982, et nous offre un éclairage passionnant sur le parcours du grand écrivain colombien. Le lien narratif entre journalisme et littérature semble évident à la lecture de ces textes courts, qu'il s'agisse de scènes de la vie quotidienne, de brèves histoires poétiques, de chroniques poli-tiques sur les Sandinistes et l'élite politique colombienne, ou de réflexions intitulées « Le fantasme du Prix Nobel » ou « Comment écrire un roman ». Un portrait de Hemingway, un autre de Fidel Castro, des évocations de Paris, Mexico ou Bogota complètent ce choix de textes dont on ne peut qu'admirer la hauteur de vue et surtout le rythme. Gabriel Garcia Marquez fut ce grand conteur de l'Histoire aussi bien dans ses romans que dans ses écrits dits journalistiques.
Traduit de l'espagnol (Colombie) par Gabriel Iaculli. -
Écrit en 1939 au Mexique où María Zambrano est alors en exil, Philosophie et poésie constitue une entrée idéale dans l'oeuvre de la philosophe espagnole. Dans ce bref volume elle analyse deux versants, non pas antinomiques mais complémentaires, de la pensée depuis les Grecs?: «?Aujourd'hui poésie et pensée nous apparaissent comme deux formes insuffisantes, nous semblent être deux moitiés de l'homme?: le philosophe et le poète. L'homme entier n'est pas dans la philosophie?; la totalité de l'humain n'est pas dans la poésie?».
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Du conte de fées
J. R. R. Tolkien
- Christian Bourgois
- Littérature Étrangère
- 3 Novembre 2022
- 9782267046694
Découvrez le texte fondateur de J.R.R. Tolkien, précurseur des théories sur le conte de fée, le merveilleux et la littérature de Fantasy.
Du conte de fées est l'essai de Tolkien qui correspond le mieux à l'ensemble de son oeuvre créatrice. Il est essentiel à la compréhension des écrits de Tolkien lui-même, et il pose bon nombre de ses principes créateurs, parmi lesquels la sous-création, le concept de Faërie et la valeur de la fantasy. L'objectif de la présente édition est d'ouvrir à l'oeuvre créative et théorique de Tolkien, afin de saisir son raisonnement autour de la littérature dite de Fantasy et le conte de fée.
Cette nouvelle édition française est accompagnée d'une préface de Nathalie Prince, universitaire spécialiste des littératures jeunesse et de Fantasy.
Dans cet essai, Tolkien se pose trois questions : qu'est-ce qu'un conte de fées ? Quelles en sont les origines ? Et surtout : quelle est leur utilité ? Les notions abordées y sont très importantes pour cerner l'importance qu'accorde Tolkien au conte de fées et mieux comprendre l'univers original qu'il a créé au fil de ses ouvrages. -
Profanations : il s'agit en dix gestes, de penser la profanation comme l'acte de création et la tension de la modernité : « La profanation de l'im-profanable est la tâche politique de la génération qui vient ». Dix profanations, dix gestes : dix textes, dix essais, souvent courts, de style varié et de registre souvent différent. Dix actes.
Il ne s'agit plus ici de commenter, mais d'écrire, d'inscrire la pensée dans la langue. Giorgio Agamben renoue ici avec le style de quelques-uns de ses essais les plus littéraires et les plus libres. L'ensemble des textes est porté, tendu par une inspiration et un souffle haletant. On pense à Stanze, bien sûr, mais aussi à Idée de la prose, à La communauté qui vient ou à Bartleby ou la
création. C'est qu'il s'agit de penser la création, le geste de l'art mais aussi de le produire.
On tient là un des livres les plus libres et les plus inspirés de Giorgio Agamben : on parlerait volontiers de petits essais en prose, ou de petites proses théoriques, pour indiquer ces profanations de l'écrivain.
1. La série des profanations s'ouvre sur une méditation libre sur le Génie, sur ce qu'il faut entendre par génie, depuis le genius latin, jusqu'à la séparation d'avec le génie. Cette première profanation est écrite sous le signe d'Ariel.
2. Le jour du jugement porte sur la photographie et l'auteur nous dit ce qui le point dans l'image photographique c'est-à-dire pourquoi il aime telle ou telle photo et ce que telle ou telle photo lui prescrit.
3. Ce que sont les Aides, en quoi ils nous aident, nous escortent et nous portent secours, ce qu'est ce secours, il faut le demander à Kafka. Cette troisième profanation est une méditation sur la finitude.
4. Avec Parodie, l'auteur renoue avec La fin du poème et offre une des contributions les plus originales à l'histoire de la littérature italienne. La thèse est profanatrice puisqu'elle consiste à tenir que la parodie serait au coeur de la littérature italienne comme son ressort et son âme même.
5. La courte prose Désirer interroge avec émotion le temps qui reste pour que nos désirs prennent la parole. La réponse ne se trouve -t-elle pas dans une réflexion sur le messianisme oe
6. Magie et bonheur pose les conditions de possibilité d'une pensée authentique de la magie, aujourd'hui, pour aujourd'hui.
7. Avec Être spécial, Giorgio Agamben renoue avec sa pratique de l'aphorisme et de la pensée détachée. Ce qu'est qu'être spécial, en quoi cette singularité opère dans les relations entre les hommes, en quoi il importe à une réflexion sur le beau, sur l'image et sur l'amour, c'est ce que l'auteur nous propose de penser.
8. Que reste -t-il de la mort de l'auteur ? Quel est le sens et quelle est la portée du texte de Foucault et pourquoi a-t-il fait date ? Dans L'auteur comme geste, Agamben ne répond pas seulement en historien impeccable et en philologue rigoureux. Il actualise la question.
9. L'éloge de la profanation donne son élan au volume. Comment être patient et vigoureux à la fois ? Cette reconstruction du concept de profanation le long des rayonnages de l'histoire des religions offre à la modernité son programme et son exigence. Elle passe par une méditation sur ce qu'est un musée à l'âge du capitalisme, sur ce qu'est la pornographie et sur la défécation. Agamben renoue ici avec sa passion du visage.
10. Les six plus belles minutes de l'histoire du cinéma : cet envoi est un petit poème en prose.
Le génie, l'image, la parole, l'auteur, la magie, le cinéma : le programme de ces Profanations se confond avec la possibilité d'une nouvelle critique de la faculté de juger. Elles en offrent les concepts comme les premiers chapitres.
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Ce recueil peut être considéré comme une suite logique des Six promenades dans le bois du roman ou d'ailleurs ou de Lector in Fabula.
Ces textes s'adressent à un vaste public averti : ils traitent de la fonction de la littérature, de l'influence dans l'histoire d'un écrit sur des évènements historiques, des problèmes spécifiques à la narration comme la représentation verbale de l'espace, l'ironie intertextuelle, la nature des mondes possibles de la fiction, et quelques concepts clés de l'écriture « créative », comme les symboles, le style, les « béquilles »...
D'autres interventions portent sur les auteurs qu'Umberto Eco a beaucoup lu. Bien des pages sont d'une richesse, d'une force et d'une beauté exceptionnelle, celles où éclot le véritable amour d'Eco pour Manzoni, Borges, Joyce, Nerval... mais aussi aussi Dante et Aristote. La littérature française occupe une place de premier plan : Proust, Stendhal, Rabelais ainsi que les classiques italiens et anglo-saxons.
Dans le dernier chapitre : « Comment j'écris », Umberto Eco évoque son activité d'écrivain. Il prend pour exemple sa propre expérience et nous éclaire sur son savoir-faire.
Eco nous fait ainsi entrer dans son jardin. Bien sûr nous le connaissons. Nous savons quelles fleurs et quels fruits il y cultive. « Un jardin à l'anglaise » dit-il. Il faut être un esprit très libre et très riche pour donner ainsi tout de soi, un auteur qui ne craint pas qu'on « voit » ses trucs et ses manigances... Umberto Eco montre, démonte et démontre. -
Lina, femme au foyer et mère de deux enfants, enferrée dans un mariage sans passion depuis dix ans, retrouve un ancien amour adolescent et se lance dans une aventure qui, très vite, finira par la consumer.
Sloane, entrepreneur à succès dans une enclave chic du Nord-Est, supposément épanouie dans son couple libre, va prendre conscience des dynamiques de pouvoir inégales qui régissent son mode de vie.
Enfin, Maggie, étudiante, noue une relation avec son professeur d'anglais, dont les conséquences bouleverseront son existence.
Fondé sur huit années de reportage intensif, et narré avec une franchise et un sentiment d'urgence étonnants, Trois femmes est la peinture fondatrice de l'éros dans la société d'aujourd'hui. Il expose avec une profondeur et un pouvoir émotionnel sans précédent la fragilité, la complexité et l'inégalité du désir féminin.
Traduit de l'anglais par Luc Dutour Distingué par le British Book Award dans la catégorie non fiction Sélection de rentrée France Inter / Le Point « Indispensable. » The Times « Littéralement impossible à lâcher. » Gwyneth Paltrow « Un extraordinaire page-turner qui explore le désir, le chagrin et la passion dans les moindres nuances » The Washington Post « Exploration de l'amour et du désamour contemporains, de ses rêves comme de ses contradictions, Lisa Taddeo réussit une étonnante coupe du désir féminin et de sa mystérieuse alchimie. » Point de vue « Tout en gardant la vérité de leurs récits, elle a écrit leurs vies comme on écrit un roman. Le résultat est inouï. » Psychologies « On entre dans ce reportage-roman comme dans une série Netflix. » Le Point -
« Comment l?amour qui nous abêtit, et qui est potentiellement capable de faire de nous des brutes, peut-il être ressenti et désigné comme le bonheur suprême ? L?amour n?est-il qu?une maladie, et non la plus belle, mais la plus terrible qui soit ? Ou bien est-il un poison dont le dosage décide s?il est bénéfique ou dévastateur ? Au secours, Socrate, au secours ! » C?est bien l?amour et son funeste double, la mort, que l?auteur du Parfum a choisi d?embrasser ici dans un même mouvement d?humour et d?audace. L?essayiste en appelle à Goethe, Wagner ou Stendhal, compare les destins d?Orphée et de Jésus qui, tous deux, ont tenté de vaincre la mort au nom de l?amour. Mais c?est surtout le romancier que l?on retrouve avec bonheur dans ce bref essai, lui qui sait, mieux que personne, brosser en quelques lignes des saynètes cocasses et bouleversantes.
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En hiver, la Norvège est plongée dans le noir. Mais est-ce vraiment le cas ? Deux tiers des Norvégiens, comme 80 pour cent des Américains du Nord, ne peuvent plus distinguer la Voie lactée pendant la nuit. Les lampadaires, néons et écrans illuminent le ciel et empêchent de la voir.
Quels sont les effets de cette lumière artificielle sur les humains, les animaux, et toute chose vivante ? Aussi loin que remontent ses souvenirs, Sigri Sandberg a toujours eu peur du noir. Elle entreprend un voyage en solitaire dans les montagnes, en plein hiver, pour éprouver l'obscurité et pour comprendre ce qui se cache derrière sa peur. Au cours de son périple, elle nous fait découvrir une autre femme, Christiane Ritter, qui a passé un hiver entier dans une hutte de trappeur dans le Svalbard en 1934.
Sigri Sandberg décrit sur ce qui se passe dans le corps pendant la nuit. Elle évoque le sommeil, les étoiles, les trous noirs, les lumières du Nord, mais aussi les lois du trafic aérien et la lutte pour préserver un ciel nocturne. Son livre cherche à donner un sens à l'obscurité.
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" Je ne veux pas mourir, mon petit Journal ! Je veux vivre, même si je dois être la seule à rester ici ! Je me cacherai dans une cave, un grenier ou n'importe quel trou jusqu'à la fin de la guerre. " C'est la dernière note du Journal. Quelques jours plus tard, Eva Heyman est envoyée avec ses grands-parents vers Auschwitz, où elle est morte dans une chambre à gaz le 17 octobre 1944. Elle avait treize ans.
Commencé le 13 février 1944 et interrompu le 30 mai 1944, ce bref Journal a été écrit en partie entre les murs du ghetto d'Oradea, le plus grand du nord-ouest de la Transylvanie, considéré comme un modèle par les autorités fascistes de Budapest. La jeune adolescente y consigne avec une lucidité troublante son inquiétude qui, au fil des jours, devient panique devant l'évolution des événements : " Je pense toujours que nous avons vécu le pire et après je me rends compte que tout peut toujours être pire et même pire que pire...
" À treize ans, Eva connaît et comprend des faits que d'autres, bien plus âgés, ignorent. Ses parents sont des intellectuels progressistes et donnent une appréciation lucide de l'évolution de la guerre, ressentent le danger de mort qui les guette. Ce texte, d'une grande sensibilité, montre une fillette intelligente, pleine de vie, qui veut se réjouir de la beauté des choses, qui aime les gens et a confiance en eux.
Ainsi, sans le vouloir, et dans un récit d'une sincérité et d'une pureté impressionnantes, Eva Heyman a légué à la postérité l'une des plus importantes sources documentaires sur le sort des Juifs de cette région.
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Carnets de guerre 1914-1918
Ernst Jünger
- Christian Bourgois
- Litterature Etrangere
- 9 Janvier 2014
- 9782267025897
Ces Carnets de guerre 1914-1918 constituent un texte de première importance, qui permet de porter un regard neuf sur les débuts de l'écrivain.
Entre ces Carnets, notes prises sur le vif par un jeune engagé volontaire de dix-neuf ans, dans une quinzaine de petits carnets d'écolier qu'il portait constamment sur lui, même en pleine bataille, et les Orages d'acier, cette réécriture raffinée, rédigée après la défaite allemande par un brillant débutant qui découvre peu à peu les ressources de la littérature, il y a toute la différence entre un témoignage brut et une oeuvre d'art.
On connaissait depuis longtemps l'existence de ces petits carnets qui ont servi de matière première à Orages d'acier et aux deux autres récits que Jünger a tirés de cette expérience de la guerre, Feu et Sang et Le Boqueteau 125, mais ils n'ont été édités en Allemagne qu'à l'automne 2011. La première étude universitaire exhaustive à leur sujet avait été celle d'un jeune chercheur anglais, John King, publiée en 2003 sous un titre volontairement provocateur à propos d'un auteur considéré comme un apologiste sans réserve de la guerre. Il s'agit d'une phrase extraite des Carnets 1914-1918, et qu'on n'attendait pas d'Ernst Jünger : Quand donc cette guerre de merde va-t-elle enfin se terminer ?
Déjà dans ce titre, la nouveauté de l'oeuvre éclate, par rapport aux textes connus de Jünger. Par ailleurs, les différentes allusions de Jünger à ces carnets, souvent tachés de boue ou de sang selon ses propres termes, laissaient croire qu'il s'agissait de notes hachées, quasi sténographiques, arrachées à l'action et presque illisibles telles quelles. Or ce n'est pas du tout le cas ; il s'agit d'un texte généralement bien rédigé et très fort émotivement, même s'il ne témoigne pas encore de la maîtrise stylistique acquise plus tard par l'écrivain. En tant que témoignage direct, on peut même le considérer comme plus intéressant que les oeuvres littéraires que Jünger a ensuite publiées à partir de lui, car son authenticité est évidemment bien plus grande. En soi, ces Carnets mériteraient notre attention, même s'ils n'avaient pas été rédigés par un grand écrivain. Malgré ses quatorze blessures, Jünger est constamment reparti en première ligne, et il est l'un des rares témoins du conflit à avoir jour après jour enrichi sa chronique, quatre années durant sur le front, à Verdun et sur la Somme.
Ces carnets présentent par ailleurs un double intérêt en tant qu'oeuvre de Jünger. Ils révèlent d'abord des aspects inconnus ou volontairement voilés de sa personnalité complexe : sa brève idylle amoureuse avec une jeune Française, pudiquement évoquée dans Orages d'acier, est ainsi plus largement développée ; de même, les aspects terre-à-terre de la vie quotidienne du soldat (mauvaise nourriture, beuveries, bagarres, passages au bordel etc.) sont beaucoup plus présents ; et l'on découvre un aspect bien plus frondeur du lieutenant Jünger par rapport à la hiérarchie militaire que l'on n'en pouvait juger d'après les oeuvres publiées.
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Désirs de révolution : le manifeste des Pussy Riot
Nadejda Tolokonnikova
- Flammarion
- Litterature Etrangere Flammarion
- 16 Mars 2016
- 9782081359444
L'histoire des Pussy Riot raconté de l'intérieur, de la création du groupe en 2011 jusqu'à l'emprisonnement de ses membres en passant par leurs actions depuis leur libération. Le récit de leurs combats contre la domination masculine et le caractère réactionnaire de l'Etat sous Poutine est l'occasion d'un portrait sans concession de la société russe contemporaine.
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Tolkien et la grande guerre
John Garth
- Christian Bourgois
- Littérature Étrangère
- 6 Mars 2014
- 9782267026245
« Être emporté en pleine jeunesse par 1914 n'a pas été une expérience moins abominable qu'en 1939... en 1918, tous mes amis proches, sauf un, étaient morts. » C'est en ces termes que J.R.R. Tolkien répondait aux critiques qui voyaient dans Le Seigneur de
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Les dilemmes de Lénine
Tariq Ali
- Sabine Wespieser Éditeur
- Litterature Etrangere
- 5 Octobre 2017
- 9782848052298
Le culte de Lénine, dont lui-même abhorrait jusqu'aux formes les plus embryonnaires, a été un désastre pour sa pensée. Ses textes, qui n'avaient jamais été conçus comme un catéchisme, ont été momifiés, empêchant de comprendre ce qu'avait été sa formation politique. Celle-ci doit être replacée à la confluence de deux processus historiques. Lénine était un produit de l'histoire russe et du mouvement ouvrier européen, qui l'une et l'autre posaient des problématiques de classe et de parti, de force agissante et d'instrument. La synthèse opérée par Lénine a donc été déterminée par l'interpénétration de deux courants très différents, que l'on peut caractériser grosso modo comme l'anarchisme et le marxisme. Lénine a joué un rôle essentiel dans le triomphe du second.
Voilà pourquoi je m'attarderai longuement sur l'histoire et la préhistoire de ces deux courants, avant d'en venir à certains problèmes spécifiques auxquels Lénine et les bolcheviks ont eu à faire face. Sans cette plongée dans le passé, on saisit mal les dilemmes rencontrés par Lénine.
Tariq Ali, dès son introduction, pose les enjeux de son nouveau livre : s'il y brosse un portrait acéré de Lénine, et de son rôle capital dans l'avènement de la révolution d'octobre 1917, il se livre également à une passionnante analyse des conditions qui ont rendu possible cette révolution. Plongeant au plus près des préoccupations de l'homme d'État et du théoricien politique, dont il souligne la prescience - Lénine était très isolé dans son parti avant octobre 1917 -, ainsi que la rigueur et la limpidité des écrits, il jette un éclairage inédit sur sa vie, et particulièrement ses deux dernières années.
Avec Les Dilemmes de Lénine, Tariq Ali - lui-même intellectuel engagé et activiste politique - explore les questions auxquelles Lénine a été confronté, et qui restent d'une troublante actualité : le terrorisme est-il une stratégie ?
Est-il acceptable de soutenir les guerres impérialistes ? une action politique est-elle possible sans un appareil de parti ? quelle justification morale y a-t-il à s'emparer du pouvoir ? quelle influence les choix intimes - amoureux ou amicaux - de Lénine ont-ils eu sur son action ?
Au fil de ses interventions publiques, de ses articles, de ses essais politiques et de son oeuvre romanesque, Tariq Ali ne cesse d'en appeler à une alternative au libéralisme. Ce livre de non-fiction, par son ton très personnel, par l'ouverture de champ qu'il propose - c'est l'utopie révolutionnaire mondiale qu'interroge l'intellectuel d'origine pakistanaise - s'inscrit dans la cohérence de son oeuvre, et notamment de ses six romans publiés chez Sabine Wespieser éditeur.
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Correspondance 1949-1975
Martin Heidegger, Ernst Jünger
- Christian Bourgois
- Littérature Étrangère
- 21 Janvier 2010
- 9782267020670
Cette correspondance, qui s'étend de 1949 à 1975, constitue un témoignage de toute première importance sur les relations intellectuelles et amicales qui unirent deux représentants majeurs de la pensée allemande au XXe siècle : Martin Heidegger, considéré comme l'un des plus grands, sinon le plus grand philosophe de son temps, et Ernst Jünger, héros exemplaire des batailles de la Première Guerre mondiale, penseur de la technique et styliste exceptionnel, qui vient de connaître récemment la consécration d'une édition de ses journaux de guerre dans la Bibliothèque de la Pléiade. Le succès qui a accueilli celle-ci confirme l'intérêt du public français pour Jünger, succès qu'il partage avec Heidegger ; ce dernier, malgré la difficulté de sa pensée et les problèmes presque insolubles que la complexité de sa langue pose à ses traducteurs français, est aussi l'un des philosophes allemands les plus lus en France.
Avant même de se connaître, les deux hommes étaient déjà entrés en dialogue, car la pensée de Heidegger sur la technique doit beaucoup au grand essai de Jünger, Le Travailleur, paru en 1932, auquel il a d'ailleurs consacré un séminaire universitaire durant l'hiver 1939-1940. Leur première rencontre n'a cependant eu lieu qu'en septembre 1948.
Leurs premiers échanges épistolaires portent sur le lancement éventuel d'une nouvelle revue de haut niveau qui leur aurait permis de retrouver une visibilité dans le champ littéraire, après la débcle allemande de 1945 ; on les voit s'interroger sur cette entreprise à laquelle ils renoncent finalement, car elle risquait de prendre un caractère trop politique, dans une période où ils étaient tous deux violemment attaqués : Heidegger pour son année de rectorat à Fribourg sous le nazisme en 1933-1934, Jünger en tant qu'ancien nationaliste et apologiste de la guerre qui, malgré son absence de compromission avec le nazisme, fut néanmoins accusé d'avoir été l'un de ses précurseurs.
Loin de se borner à un banal échange de politesses entre deux écrivains majeurs, leur correspondance compte plusieurs temps forts, en particulier à propos du dépassement du nihilisme, sur lequel portent les deux textes, Passage de la Ligne et Contribution à la question de l'Être, qu'ils s'offrent mutuellement pour l'anniversaire de leurs soixante ans, fêtés respectivement en 1949 et 1955. Mais il peut aussi arriver à Jünger de demander à Heidegger de l'aider à élucider un passage difficile sur le temps, dans les Maximes de Rivarol qu'il est en train de traduire en allemand, ce qui permet au philosophe de faire à ce sujet un exposé particulièrement lumineux et accessible.
Leurs échanges ne se situent pourtant pas constamment à ce niveau d'ambition intellectuelle, même s'ils illustrent aussi une commune préoccupation pour le langage, par exemple dans l'intérêt qu'ils portent aux expressions populaires du pays souabe dont Heidegger est originaire et où Jünger vient de s'établir. Ce nouveau point commun renforce l'atmosphère d'estime et de confiance qui règne entre eux, car cette correspondance est aussi le témoignage d'une amitié qui ne s'achèvera qu'avec la mort de Heidegger. Dans un temps rythmé par les anniversaires et les envois de livres, on échafaude des projets de rencontres que les difficultés du temps ou de l'ge rendent parfois difficiles à réaliser. Pourtant leurs deux caractères bien différents s'opposent à l'occasion, lorsque, auprès d'un Heidegger plus casanier, Jünger défend son tempérament d'incorrigible globe-trotter, en reprenant à son compte le mot d'Héraclite : " Ici aussi, il y a des dieux " - et même dans la cabine d'un bateau traversant le canal de Suez !
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Toute la vie de Lénine, fondateur de l'Union Soviétique, premier régime communiste de l'histoire, de son enfance à sa montée en puissance en tant que dirigeant du courant bolchévik jusqu'à sa prise du pouvoir lors de la révolution d'Octobre.
Une biographie romancée extraordinairement vivante de Lénine, personnage fascinant, penseur, homme d'action, politicien fondateur de l'Union Soviétique et initiateur de la Tchéka comme des camps de travail forcé, le tout raconté par Ferdynand Ossendowski, écrivain de talent et témoin particulièrement bien renseigné de cette période cruciale de l'histoire mondiale.
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La fin des dieux
Antonia susan Byatt
- Flammarion
- Litterature Etrangere Flammarion
- 26 Février 2014
- 9782081202634
En pleine Seconde Guerre mondiale, tandis que les bombes pleuvent sur l'Angleterre, une jeune fille est évacuée à la campagne. Elle a bien du mal à comprendre le chaos qui l'entoure, mais un livre de mythes scandinaves va venir bouleverser sa vie. Elle découvre un univers où une meute de loups poursuit inlassablement le soleil et la lune, un serpent gigantesque hante les profondeurs et des dieux se livrent à une bataille sans merci, détruisant la planète par leur inconscience. A. S. Byatt crée avec La Fin des dieux un conte puissant et prophétique qui interroge notre propre mortalité.
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À bien y regarder, tout ceci n'est qu'une erreur, mais voilà : les erreurs ont été commises et c'est à nous d'en assumer les conséquences. " Cette phrase écrite par H.G. Adler au début de son roman en donne le ton et la substance : face à l'absurde, à l'incroyable, comment l'homme parvient-il à assumer un destin dont il ne maîtrise plus rien ? Adler cherche ici à apporter une réponse à cette question. Que cette réponse prenne la forme d'un roman s'inscrit dans la substance même du choix fait par l'auteur : répondre, par la rigueur et la force d'évocation du langage littéraire, à une situation que la raison n'est plus capable d'appréhender.
Le roman raconte le destin des membres d'une famille juive, celle du docteur Lustig - très semblable à celle d'Adler - depuis le début des mesures d'exclusion raciale, au cours de leur déportation vers un lieu ressemblant à Theresienstadt, et jusqu'à la libération par les Américains.
Un voyage n'est bien entendu pas le premier roman consacré au thème de la déportation et des camps de concentration nazis. Il est sans doute le seul, en revanche, à avoir cherché une forme littéraire parfaitement spécifique pour rendre compte de l'indescriptible. Adler utilise dans son texte un étonnant mélange d'abstraction et de narration, projetant le quotidien des camps dans une sorte de réalité parallèle, déconcertante, comme s'il s'agissait d'exprimer et de comprendre enfin une angoisse dont aucune description de lieux, de personnages ou de faits réels ne pourra jamais rendre vraiment compte : l'interdiction pure et simple de la vie, énoncée sous forme de commandements quasi-religieux passant par les institutions de l'État : police, justice et administration.
" Les Interdits " sont ainsi les habitants juifs auxquels on a interdit jusqu'au fait d'avoir un domicile. " Les Émissaires " sont les membres de la police juive chargée d'informer ceux qui vont être déportés de la date de leur départ. Et " les Héros " sont les petits sbires de la SS, une désignation qui contraste brutalement avec leur esprit étriqué et haineux. C'est l'usage systématique et profondément réfléchi de cette technique littéraire qui permet au roman d'Adler de se démarquer de tout ce qui a été écrit sur la déportation et les camps nazis : une transfiguration romanesque, souvent très abstraite et pourtant tissée de récits et d'émotions, qui plonge le lecteur dans un univers parallèle, où la réalité renaît sous forme d'idées et de mots, peut-être plus terrifiante encore que dans sa description brute. Il n'y a plus de dissonances entre la fiction et la réalité.
Écrit par Adler en 1950, après qu'il a émigré en Angleterre, Un voyage n'a été publié en Allemagne qu'en 1962. Après la guerre en effet, les grandes maisons d'édition étaient plutôt réticentes à faire paraître des romans consacrés à l'Holocauste, estimant, dans la lignée d'Adorno, que la tragédie ne pouvait être mise en fiction. Seul un petit éditeur accepta de le publier.
H.G. Adler est né en 1910 à Prague, où il a fait des études de littérature, de sciences et de musique avant de travailler pour la radio tchèque à partir de 1935. En février 1942, il est déporté avec sa famille à Theresienstadt, puis à Auschwitz, où sa première épouse et sa mère sont décédées, et, deux ans plus tard, dans des subdivisions de Buchenwald, où il a été libéré par les Américains. Au total, il a perdu 16 membres de sa famille dans les camps, dont ses parents. De 1945 à 1947, il travaille au musée juif de Prague, s'efforçant de développer les archives concernant les persécutions et le camp de Theresienstadt. Il part ensuite s'installer à Londres, où il se remarie et a un fils. Il a alors consacré la majeure partie de son existence à enseigner et écrire sur la Shoah. Plus connu pour ses essais et ses études (il a notamment fait paraître des études sur Theresienstadt, un essai sur le combat contre la " solution finale " et sur la déportation), il est l'auteur de 26 ouvrages de poésie, de philosophie, d'histoire et six de fictions - dont Un voyage - pour lesquels il a reçu de nombreux prix. Il est mort à Londres en 1988.
Un chef d'oeuvre, écrit dans une prose particulièrement belle et pure. [...] Adler a réinstallé le principe d'espoir dans la littérature moderne. " (Elias Canetti) Salué par Heimito von Döderer et Elias Canetti, proche du travail de James Joyce et de Virginia Woolf par le caractère innovant de son style, Un voyage s'inscrit dans la lignée des ouvrages de W.G. Sebald. L'influence de Kafka est aussi sensible. Comme dans Le Procès et Le Château, l'arbitraire et l'anonymat du pouvoir sont flagrants. Ce livre apporte la preuve que l'art a la capacité de rendre compte de l'inimaginable, qu'il peut même élargir la perception que les gens peuvent en avoir. Un livre qui ne peut que fasciner toute personne s'intéressant à l'histoire récente et à la littérature moderne.
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Journal (1918-1920)
Nelly Ptachkina
- Éditions des Syrtes
- Litterature Etrangere
- 6 Octobre 2011
- 9782845451568
25 juillet 1920, Nelly Ptachkina tombait dans la cascade du Dard, au pied du Mont-Blanc.
Elle avait dix-sept ans et laissait un journal, édité ensuite par sa mère, dans les années 1920. Joseph Kessel en publia des extraits dans ses Souvenirs d'un commissaire rouge. Le Journal (1918-1920) recouvre la chronologie de la guerre civile depuis son déclenchement jusqu'aux débuts des conflits russo-polonais, lesquels entraîneront la guerre soviéto-polonaise. Mue essentiellement par la nécessité d'une introspection liée à la construction de sa personne, Nelly utilise ses notes pour rédiger de véritables "rapports" sur son état intérieur face à ces complexes bouleversements historiques.
Elle ignore alors, mais plus pour très longtemps, que vivre et s'observer, pour elle, sera synonyme de se penser comme témoin historique. D'une maturité peu commune et d'une indépendance d'esprit absolue, Nelly, dont la personnalité est peu à peu façonnée par la présence constante de la mort et la perspective de la destruction du monde familier, reste cependant attachée à une Russie dont elle n'a pas encore compris ni accepté la disparition.
Mais, face aux pogroms qui déchirent l'Ukraine et à l'explosion de la violence, l'émigration devient salut, même si c'est le coeur lourd qu'elle se sépare des paysages familiers. Images vues comme à travers le trou de la serrure, de façon parcellaire, fragmentée, floue: c'est ainsi que la révolution et la guerre civile apparaissent à un individu isolé, aux familles jetées dans la tourmente et, à plus forte raison, à une adolescente pensant son devenir dans un monde déstructuré.
Mais l'acte de l'écriture implique une volonté magistrale : c'est de cette volonté que Nelly sera porteuse, érigeant la vie privée en acte de résistance et l'écriture de soi en un document contribuant à l'élaboration d'une micro-histoire du XXe siècle.
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Si Le Galaté au bois, premier volet de la trilogie d'Andrea Zanzotto,
prenait pour thème un sud matérialisé par les bois sombres et feuillus du
Montello semés de riches traces historiques, Phosphènes, le second pan du
dessein trinitaire, campe, pour sa part, un nord peu ou pas historicisé,
fortement minéralisé, inclinant au blanc enneigé, givré ou glacé. Dans cet
univers comme surexposé, de réfractions en diffractions, la lumière est au
surcroît. Une foule de scintillements se propagent de place en place, la parole
s'émiette en une multitude de bribes tantôt abstraites tantôt concrètes où les
effets de vérité et les épiphanies - Eurosie qui protège de la grêle et Lúcia
porteuse de clarté au plus sombre de l'hiver - se bousculent. Cet univers
transi et congelé se révèle toutefois réversible car, invisibles, des lacs
peuvent se former sous les glaciers les plus hostiles, la lumière ricocher sur
les surfaces blêmes. Un jeu d'oppositions contradictoires, mimant d'une
certaine façon le silence et le cri, se fraye alors la voie. Le couple
conflictuel et finalement complice du carbone et de la silice, susceptible de
se changer en silicium, se fraye la voie. Une recomposition des minuscules
signes éblouis, aveuglés explose alors en une pulvérulence de phosphènes
proches et lointains, intérieurs et extérieurs, impersonnels ou privés. Des
gisements de souvenirs fossilisés ou enfouis épars réaffleurent à mi-chemin du
sens et du non-sense sur une page virginale mimant tous les jeux du
recommencement. Là le moi et le monde se superposent sans se confondre pour
parler ensemble et l'un de l'autre, l'un a travers l'autre, comme dans la
transparence d'un prisme cristallin faceté. Un miracle synesthésique et
anagrammatique devient alors tangible, la conquête d'une apaisante lumière
dorée apaisante procédant d'une temporalité au futur antérieur devient
finalement tangible. Andrea Zanzotto (Pieve di Soligo, 1921) est issu de
l'hérmétisme. Il s'en éloigne dès Vocativo (1957). Une ironie insistante vient
bouleverser le bel ordonnancement des images. À compter de IX Ecloghe (1962),
il va s'attacher à explorer les plans de clivage de la tradition à travers le
chant amébée. La Beauté (1968, Maurice Nadeau, 2000) constitue un premier
aboutissement. Pâques (1973) s'ouvre notamment à la picturalité de la page et
La Veillée (1976) s'abandonne à la poésie dialectale. Toutes ces découvertes
confluent bientôt dans une trilogie récapitulative : Le Galaté au bois (1978,
Arcane 17, 1986), Phosphènes (1983), Idiome (1986, José Corti, 2006). Météo
(Maurice Nadeau, 2002). Andrea Zanzotto a également donné un recueil de
nouvelles, Dans la brûlante chaleur (Maurice Nadeau, 1997) et de nombreux
essais publiés par José Corti sous le titre d'Essais critiques (2006). Son
dernier ouvrage s'intitule Surimpressions (2001).
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Correspondance
Søren Kierkegaard
- Éditions des Syrtes
- Litterature Etrangere
- 4 Décembre 2003
- 9782845450653
Publiée pour la première fois en français dans son intégralité, la correspondance complète de Soren Kierkegaard est un document singulier, qui dévoile des aspects méconnus de l'un des philosophes majeurs d XIXe siècle. À la fois véritable texte littéraire et mise en oeuvre concrète de ses idées philosophiques, elle éclaire sous un jour nouveau la relation toute particulière entre l'homme et son oeuvre, et constitue l'illustration vivant de la singularité de l'approche du philosophe danois. Elle révèle aussi combien la pensée de Kierkegaard est finalement, et paradoxalement, une pensée non pas de l'angoisse et du désespoir, mais bien du don et de la joie En lisant ces lettres, on comprend mieux la relation tourmentée de Kierkegaard à sa fiancée Régine, l'une de ces grandes histoires d'amour passée à la postérité littéraire autant par son incompréhensible rupture qu par l'influence qu'elle a eue sur son oeuvre. On y perçoit l'indéfectible union qui le liait à son seul ami, Emil ; on découvre aussi un Kierkegaard tendre et drôle, comme dans l'étonnant échange avec ses neveux et nièces, un Kierkegaard empreint de sollicitude quand il s'adresse à sa belle-soeur alitée ou à son cousin handicapé, un Kierkegaard tour à tour ludique, enjoué, sarcastique ou venimeux... Écrire à quelqu'un, pour Kierkegaard, ce n'est pas discourir sur des idées, qu'elles soient les siennes ou celles des autres : écrire a toujours chez lui une portée éthique. Comment toucher sans violenter, édifier sans forcer ? Traversée par l'inlassable travail de l'esprit pour coïncider avec lui-même, dans l'ouverture à autrui, chaque lettre semble remettre sur le métier la difficile question de l'aide qu'un individu peut et doit apporter à l'autre.