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Corlevour
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On ne résume guère cette pièce, qui est d'une extrême complication, digne des pastorales baroques et maniéristes. Une cour entière est réfugiée en forêt autour de son roi exilé, Frédéric.
C'est alors la peinture des intrigues amoureuses avec masques et changements de sexe, mélancoliques et passionnés, sages et bouffons, jusqu'au rétablissement final de chacun dans ses droits.
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De Ron Rash, le public français ne connaissait jusqu'à présent que les romans noirs, publiés notamment par les éditions du Seuil, et, depuis quelques années, par Gallimard. Or, c'est à sa poésie que Ron Rash est peut-être le plus attaché, ainsi qu'il nous l'a confié lors d'une rencontre à Bruxelles en octobre 2022. Ce manque est désormais comblé avec la traduction de Poems, volume qui réunit l'essentiel de ses divers recueils : Eureka Mill paru en 1998, Among the Believers (2000), Raising the Dead (2002) et Waking (2011).
Nous avons choisi d'intituler cet ensemble Réveiller les morts, car c'est de cela qu'il s'agit au fil de ces 125 poèmes : redonner vie aux disparus. Vous allez remonter un siècle d'histoire américaine sur cette terre du Sud des Appalaches aux confins des deux Caroline, où Ron Rash a grandi. Il a vingt ans en 1973 lorsque la vallée de Jocassee, ancienne terre indienne Cherokee située dans le Nord-Ouest de la Caroline du Sud, est ensevelie sous un lac de barrage. Les vivants qui en sont chassés ouvrent les tombes pour réveiller les morts, les emmener avec eux avant que l'eau n'arrive. Jocassee signifie « lieu de l'être perdu » et c'est bien à une quête de ceux qui ne sont plus que Ron Rash nous invite. Leur mémoire habite les espaces, de l'âpreté des champs à la misère de l'usine. -
Maria Zambrano est à la fois une philosophe, c'est sa formation, et une poète, c'est son inclination. Elle écrit des sortes de poèmes philosophiques qui tout ensemble émeuvent, donnent à voir et à penser, s'inscrivent très profondément dans la mémoire, agissent sur nous de l'intérieur et aident à vivre. Mais - est-ce parce qu'ils échappent à un genre défini, parce qu'en eux la pensée et la vision vont chercher d'elles-mêmes la forme où elles se diront ? - ils résistent à une lecture académique. Il est difficile de traduire Maria Zambrano, ce qui désespérait Camus qui ne trouvait pas de traducteur pour L'homme et le divin, il est tout aussi difficile d'écrire sur elle. J'ai mis plus de quinze ans avant de le tenter, et encore, timidement. J'ai essayé de différentes manières. La plus importante, qui n'apparaîtra pas ici, a été l'écriture poétique. écrire des poèmes, c'était essayer de rejoindre Maria Zambrano. Ce n'était pas écrire sur elle mais avec elle, selon elle, dans la direction qu'elle m'indiquait par son oeuvre dans ma vie. Je pense que c'était une juste manière de lui être fidèle, de recevoir son enseignement. Ainsi, en écrivant, en la lisant, ma vie peu à peu s'ouvrait de l'intérieur, s'éclairait, se transformait, s'illuminait sans s'éblouir.Jean Marc Sourdillon
Jean Marc Sourdillon a publié en poésie Les Tourterelles (La Dame d'onze heures, préface de Philippe Jaccottet, encres d'Isabelle Raviolo, 2009), Les Miens de personne (La Dame d'onze heures, préface de Jean-Pierre Lemaire, lavis de Gilles Sacksick, 2010), Dix secondes tigre (L'Arrière-pays, 2011), En vue de naître (L'Arrière-pays, 2017), La Vie discontinue (La part commune, 2017) et chez Gallimard : L'unique réponse et Aller vers. Il a également traduit Maria Zambrano et édité les oeuvres de Philippe Jaccottet dans la Pléiade. -
Gaëlle Fonlupt
Philippe Brunet
Xavier Bordes
Hélène-Henry Safier
Agnieszka Wolny-Hamlalo
Michal Grabowski
Blaise Guinin
Alejandra Mendez Bujonok
Jacques Rancourt
Jane Hirshfield
Geneviève Liautard
Raúl GonzÁlez Tuñón
Susana Peñalva
Jean-Simon Mandeau
Alin Anseeuw
Antoine Beauchamp
Christian Degoutte
Jean-Christophe Bellevaux
Dorian Masson
Anne Mulpas
Joanna Mico
Maud Thiria
Didier Ayres
Jacques Rancourt
Hélène Sanguinetti
Sylvestre Clancier
Jean-Marc Barrier
Bérengère Blasquez
Mireille Boissel
Jean-Louis Giovannoni
Antoine Emaz
Jacques Garelli
Gérard Cartier
Perrine Le Querrec
Guillaume Marie
Étienne Faure
Benoît Conort
Thierry-Pierre Clément
Francis Debax -
Sauf bêtise de ma part, corrigez-moi, jadis votre vie était un festin où s'ouvraient tous les coeurs, où tous les vins coulaient, je m'en souviens parfaitement, c'est une chose que d'ailleurs j'avais notée, j'eusse aimé en faire un poème de saison. Que de longtemps le poète se soit attelé à l'office de grand échanson de l'ivresse générale, et que son émoi de créateur ait connu au siècle passé (le vingtième) plusieurs décennies de sourcilleux alcootests ne change rien à la chose : il est urgent de réhabiliter dare-dare cette mythologie éméchée de la poésie comme supplément de joie. Et puisque l'on sait depuis Thérèse d'Avila que Dios se mueve entre los cacharros (le Très-Haut récure aussi les casseroles de la cuisine), je propose de ne pas perdre un instant et de restituer au poète, au miroir des tendances alimentaires actuelles, son ministère romantique de Pizzaïolo Officiel des Dieux... et de Chef Etoilé des Muses ?
Olivier Liron est né en 1987, poète et romancier, il vit à Paris. Il est l'auteur, chez Alma éditeur, de deux romans, Danse d'atomes d'or (2016) et Einstein, le sexe et moi (2018, Grand prix des blogueurs littéraires). Puis, chez Gallimard : Le Livre de Neige, et, dernièrement un récit : La Stratégie de la sardine, 2023, Robert Laffont. -
Par vous, fleurs opaques,
j'ai touché à l'énigme
de la mort annoncée
J'avance à tâtons
vers cet espace offert
où plus rien ne fait signe
jusqu'à la douceur
qui s'accroît du pas
de la nuit -
Si nous ne l'avions pas, nous aurions quoi
Pour incendier la cervelle de nos chiens dans l'aube, si seuls
Les faire descendre dans leur sang, le sang, un givre
Nous aurions quoi comme roc, en pointe, au corps
Quelle involution
Nous aurions quelle salive
Quels genoux, incrustés de farine, plantés, en lumière qui faiblit, le fil
On rentrerait encore plus lourds du fond des arbres, dans l'ombre, le lait
On avalerait la mort
Sans les yeux scintillants, suppliciés
Sans la gorge déployée, entravée
D'une dernière caresse, carcasse fauve
On aurait quoi -
Le nouveau recueil de Céline Walter, Poèmes de gouttière, est une déambulation poétique au-dessus de ses Toi. Toi, c'est d'abord Dieu que l'on célèbre à la manière des transcendantalistes, au coeur de la nature, dans des cathédrales d'os et d'oiseaux. Toi ce sont aussi les disparus qui ne le sont qu'en apparence - le silencieux, Une en présence multiple - comme le rappelle la longue prière au coeur du recueil, Ombre sans épine, sorte de transe chamanique où une jeune fille morte dialogue avec le nocher qui l'embarque de la vie vers la vie. La vie s'incarne, après ce voyage, dans la re-naissance et l'innocence enfantine - L'écorce d'avril.
Toi enfin, c'est l'inconscient de la poète qui guide la Louve qui clôt le recueil - vas au plus profond/de plus en plus loin/de plus en plus seule/de plus en plus mortelle. Louve est aussi métaphore du passage à l'acte d'écrire qui, chez Céline Walter, est enfant de l'imagination active décrite par Jung dans Le livre rouge.
Les poèmes de gouttière sont les empreintes d'un chemin spirituel incarné en poésie. -
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Des revues meurent, des revues naissent la forge, revue nouvelle, une de plus... Une revue de poésie, qui plus est, cette « chose » prétendument étrange et incompréhensible, légère et futile. Y a-t-il trop de revues ? Jamais assez ! Et qu'importe si le lectorat s'étiole - il en fut toujours ainsi de la plainte quant au délaissement de la poésie... C'est l'une des lamentations des poètes et des éditeurs de poésie. Parions qu'il restera un dernier carré de lucides, avides de cette futilité essentielle ; de réfractaires résistants qui ne se rendront pas aux impératifs des écrans, de l'information et du divertissement - fût-il littéraire.
La forge n'est en rien, dans ses intentions, la suite de la revue NUNC car, à la différence de celle-là, elle sera exclusivement consacrée à la poésie. Sa motivation première consiste à ne pas obéir à une logique de chapelles qui, quand elles ne s'ignorent, le plus souvent se méprisent. Toutes, nous semble-t-il, méritent notre attention, quand même nous ne serions sensibles qu'à telle ou telle d'entre elles. Toutes sont des lieux d'exploration du langage et de renouvellement de la façon de dire le monde et notre présence fugace ; des lieux de défense, des « ZAD » de la langue contre les détournements qu'elle subit à des fins idéologiques - simplifications / distorsions de la réalité - ou économiques - réduction du langage à des slogans publicitaires, au strict nécessaire de la relation commerciale.
Ces détournements n'ont d'autre objectif que l'aplatissement de la pensée, l'anéantissement de la réflexion, l'asservissement au divertissement et à la consommation. En somme : l'abrutissement de l'individu et, de facto, la destruction de sa dimension citoyenne afin de le contenir dans un état végétatif répondant aux ordres publicitaires, identitaires, ludiques.
REGINALD GAILLARD Liminaire D'AILLEURS FAUSTO URRU . SEBASTIEN MINAUX . ELISA BIAGINI . ROLAND LADRIERE . CAROLYN FORCHE THIERRY GILLYBOeUF . RON RASH . GAËLLE FONLUPT . ANNE SEXTON . SABINE HUYNH DIANE SEUSS . AUDOMARO HIDALGO . GAËTANE MULLER VASSEUR . ROHAN CHHETRI . ÉRIC AUZOUX LUUK GRUWEZ . DANIEL CUNIN & D'ICI OLIVIER BARBARANT . EMMANUEL LAUGIER . REGINE FOLOPPE . FRANÇOIS BORDES PALOMA HERMINE HIDALGO . COLINE HEZARD . ISABELLE ALENTOUR . ADELINE BALDACCHINO SOPHIE GRENAUD . JEAN ADRIAN . DOMINIQUE SAMPIERO . ROLAND LADRIERE . TOM BURON THIERRY ROMAGNE . CAROLINE GIRAUD . ORIANE TAÏEB . DAVID LESPIAU . NOUR CADOUR BLANDINE BESCOND . ANANDA BRIZZI . CHANTAL RINGUET . ANNA JOUY . DELPHINE CONSTANT L'INTIME DU POEME Mireille Havet Voix oubliées MIRON KIROPOL LA FORGE DU POETE CHRISTIAN VIGUIE . JEAN-CLAUDE PINSON . JACQUES VINCENT DAVID LESPIAU . ADELINE BALDACCHINO CAHIER CRITIQUE accompagné d'encres de Julien Spianti -
Ce premier roman évoque l'histoire d'une enfant, Nieve, développant peu à peu des troubles psychotiques après la mort de sa mère.
Il s'agit, tout à la fois, d'une fiction et d'un texte d'inspiration autobiographique : j'ai moi-même fait l'expérience de l'hôpital psychiatrique, de cette traversée difficile, empreinte de violence, dont il est malaisé de se remettre. S'il repose sur une base auto-biographique, le texte a pour objectif de transcender, dans un but cathartique, le vécu par le biais d'une fiction très libre, et d'évoquer la découverte initiatique, par une enfant, du monde, de la langue, de l'écriture. Le tout fortement sous-tendu par la structure et l'imaginaire des contes de fées, où la mère est la reine, où les hommes sont des ogres, où Nieve est Blanche-Neige, où la mauvaise soeur est la mauvaise fée dont les sorts et les malédictions sont rompus par Svet, la bonne fée. La dernière phrase du roman, adressée à la mère, condense l'enjeu du texte : « Qu'avais-je à expier, Maman, sinon le crime de te survivre ? »
Les dimensions sociale et politique sont esquissées dans le roman : Nieve est en effet d'origine argentine ; sa mère, au fil des souvenirs, évoque la dictature militaire qui a sévi dans son pays natal, et son expérience de l'exil en France, à la fin des années 1970.
Nieve s'identifiera volontiers aux enfants perdus ou adoptés (les desaparecidos), victimes de disparition forcée en Argentine.
Ce texte est par ailleurs porteur d'interrogations politiques et sociales sur la psychiatrie occidentale : « Et je pense, humiliée de ma miction, que l'hôpital est moins le lieu du soin que de la régression. Que la violence détermine le monde psychiatrique, que la méthode consiste à mater le fou, l'aliénation, à obtenir par le mépris sa docilité, et qu'une sollicitude maternelle, par instants, est le baume de ces tactiques ».
L'intérêt du roman réside à mon sens dans son originalité, tant dans son sujet que dans sa forme hybride (mi roman d'inspiration autobiographique, mi conte de fées), qui devrait pouvoir intéresser un public avisé. -
Que nous dit notre enfance lorsqu'elle s'est éloignée ?
Comment nous revient-elle, nous accompagne-t-elle, nous hante-t-elle ?
Quelles forces, quelles voix habite-t-elle autour de nous ? En nous ?
Comment, même si la vie nous bouscule, garder le goût des merveilles ?
Au fil des quatre mouvements de ce livre, l'autrice nous propose la traversée d'un monde mélancolique, parfois cruel, à lisière du conte. C'est notre enfance, peuplée d'ombres et de mystères, vulnérable mais animée d'une lumineuse énergie vitale, qui se trouve convoquée et peu à peu incarnée. Le thème du double, de la sororité imaginaire ou rêvée s'impose en dernière partie d'un recueil qui interroge avec intensité la magie de l'écriture, son pouvoir de métamorphose du réel et sa force à nous rendre ce qui était perdu. -
La « charge d'âme » en quête du « lieu » où s'incarner est le seul acte qui importe aux humains. Que nous en soyons conscients ou pas, il nous oblige, tant il est vrai que le poème ne parle jamais que d'amour. Il est notre unique séjour, notre orgasme et le creuset de nos tourments. L'identifier au fait de vivre, de créer ou de bâtir c'est reconnaître que l'amour crée l'âme, de même que la terre crée la vie. L'amour est énergie. L'intuition du ressourcement en soi, en Dieu ou dans les molécules du hasard sera toujours pour les hommes la révélation des révélations. D'après nos mythologies relatives à l'âme et l'esprit, c'est du dehors que la vie est provignée. Appréhender ainsi la vie et l'amour est très séduisant, car nous nous offrons la transcendance à peu de frais. Or, rien n'est plus faux. Innombrable en ta lumière de Nathalie Swan nous fait voir le contraire. (...) Nimrod Extraits :
La brûlure de se voir en coup de vent, la neige saupoudre le vide. Elle baptise notre écho. L'émeute à mes tempes, une fêlure d'enfance. Le ciel se coud de grâce à ta venue. Nos enchevêtrements, nos souffles affamés. Sur le bleu du ciel, mon pied dresse une cathédrale. Tu y écartes le silence, lieu de notre disparition.
Tes coups de reins labourent mon visage là où tu viens d'un pas léger. Éboulis. Quand tu creuses la faille à l'aveugle, s'avance la lumière. Deux anges retiennent de leurs mains un cri qui voudrait tout oublier. Des prières montent au secours des mots. Mes pas, de roses, jonchent ton chemin. Mon amour de derrière les églises, c'est toi quand ta pluie me flaque sur un frisson.
Nathalie Swan est professeure de philosophie et poète. Elle publie régulièrement dans les revues Margelles, Les Hommes sans épaules, la forge, etc. Elle a publié un premier recueil, L'exigence de la chair (Corlevour, 2022). -
L'autre versant du cri : Sur la poésie de Jean-Louis Chrétien
Jérôme de Gramont, Jérôme Laurent, Collectif
- Corlevour
- 6 Décembre 2023
- 9782372091213
Poète et philosophe, et chrétien aussi - c'est le même homme assurément, parce que le même corps habité de toutes ces passions. Et pourtant combien de voix distinctes échangent, se répondent, comme une première polyphonie, restreinte mais déjà bien réelle, avant de convoquer tant d'oeuvres au fil d'une érudition prodigieuse et pourtant légère. On le connaît philosophe, tout à la tâche de méditer les promesses de sens contenues dans la parole, de toute parole qui se lève et se risque à répondre à l'appel du monde, du beau, des autres, de Dieu..., mais contenues aussi dans l'espace plus resserré du poème. La parole et la voix, le nom et le corps, le cri et le murmure, la nudité et la pudeur, le plus bouleversant dans le plus intime, l'aventure entière d'être-homme dans le souffle des mots et leur silence - la poésie ne dit rien d'autre, mais avec une encore plus grande retenue, et sans aucun souci d'illustrer. Le poème juste dit, ne démontre rien. On le sait chrétien, sans jeu de mots facile, et surtout sans que la foi brûlante qui fut la sienne ne dresse le moindre péage dont le lecteur devrait s'acquitter pour entrer dans l'espace tout d'hospitalité du poème. Poésie profane donc, comme lui-même le reconnaissait, et sans qu'il y ait lieu d'émettre sur ce point le moindre soupçon. Voilà pour les différences - mais n'eussions-nous que les livres de philosophie, sans doute aurions-nous pu deviner une sensibilité poétique à l'oeuvre, doublant de sa langue d'orfèvre la rigueur des descriptions et commentaires.
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Dans les poèmes de son nouveau recueil, Le vent qui porte les pollens, Alexis Bardini aborde les thèmes de l'exil et de l'identité. La question du départ, du déracinement, la double absence qu'il fait naître et qui se transmet sans réponse au fil des générations, s'égrènent dans des poèmes en vers libres que des distiques à la forme régulière cherchent à ancrer dans la présence des émotions.
Les photographies d'Isabelle Liv offrent une résonance singulière à cet ensemble de poèmes. Elles prolongent et amplifient les voix qui traversent le recueil, dans la profondeur et l'intensité d'une énergie toute contenue. C'est un regard à la fois fort et délicat qui se pose sur les arrières-pays qui peuplent les poèmes. -
Récit des origines, le livre de la Genèse ouvre l'Ancien Testament. Cet ouvrage en reprend les onze premiers chapitres, à l'aspect symbolique et mythique très forts. Présenté dans la traduction du chanoine Osty, ce récit met en scène la création du monde, de l'homme et de la femme, et les premiers moments de l'humanité. Texte fondateur de la civilisation judéo-chrétienne, il propose, plus qu'un récit historique d'événements passés, un regard symbolique sur la condition originelle de l'homme dans son rapport à l'univers et à Dieu, sur les liens entre homme et femme, et sur l'apparition du mal dans le coeur de l'homme. Sont évoqués tour à tour les deux récits de la création, la chute originelle, le premier meurtre de l'humanité avec Cain et Abel, l'expansion du mal, la construction de l'arche de Noé, le déluge, l'origine des nations, la tour de Babel.
Loin du texte naïf auquel on le réduit souvent, la Genèse fait partie de ces grands écrits symboliques qui proposent à chacun une réflexion sur l'origine et la destinée humaine, dans un langage très simple. Un incontournable de notre culture subtilement enluminé.
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Salvatore Quasimodo (Modica 1901- Naples 1968) est l'un des principaux poètes italiens du vingtième siècle. Son oeuvre a été couronnée par le prix Nobel de littérature en 1959.
Dès 1930, le poète renouvelle le genre (Eaux et terres) par une concision, une densité et une puissance d'évocation peu communes. Ce recueil et les suivants seront rassemblés en 1942 sous le titre Et soudain c'est le soir. Le succès de ce livre est immédiat.
Viendront, après la guerre, des textes plus amples chantant l'épopée de la Résistance et la difficile conquête quotidienne de la liberté (Jour après jour, 1947; La vie n'est pas un songe, 1949; Le vert, faux et vrai, 1954; La Terre incomparable, 1958 ; Donner et avoir, 1966). Continûment, Quasimodo explore la nostalgie d'un impossible retour aux origines, qu'il s'agisse de l'enfance ou de sa Sicile natale, confondues dans un seul mythe dominé par la perfection du modèle grec antique.
Ce volume, bilingue, propose au lecteur l'ensemble des recueils que Quasimodo a publiés.
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Car le jour touche à son terme est composé de treize textes répartis en trois mouvements qui font entendre le souffle et partager la foulée, tantôt courts tantôt amples, de ces êtres que poursuivent l'abandon et sa violence. Ils s'accrochent aux terres anciennes, qu'elles soient héritées ou confisquées (c'est l'arrière-pays de la première partie) ; ils empruntent aussi la voie de leur disparition, qu'elle soit sans issue ou sans retour ; ils consentent enfin, peut-être, à ce que la lumière ne vienne plus du jour mais de son terme. Alors peut arriver un soir inespéré, de gratitude et de visitation.
Car le jour touche à son terme est porté par une écriture attachée à dire l'effondrement aussi bien que le relèvement, une écriture qui est dépouillement (notamment dans son lexique) aussi bien que vêtement (notamment dans son ampleur).
Le recours au verset et à une progression par amplification d'un terme ou d'un thème apparentent l'auteur à des poètes tels que Paul Claudel, Charles Péguy ou Pierre Oster. Cependant, le choix fréquent par celui-ci d'un lexique dur et cru, la présence parfois d'une syntaxe heurtée et saccadée, destinés à dire l'échec de la relation, la solitude et l'effondrement dans toute leur nudité et leur évidence, révèlent l'influence d'autres voix : celle d'Henri Michaux mais celles aussi, au-delà du champ de la poésie, de Samuel Beckett, Louis-René Des Forêts et même Eugène O'Neill. -
« Un monde sombre où se répand un sentiment presque apocalyptique. Et dans ce monde à l'agonie, l'érotisme célèbre une dernière fois l'ultime révolte contre notre incapacité métaphysique à habiter le monde » Thomas Ostermeier, postface de SUTURE
SUTURE est un livre hybride, bicéphale. Reliées entre elles par un texte du metteur en scène Thomas Ostermeier, la série de dessins de Julien Spianti et Château-Tyran, la pièce de théâtre du poète et dramaturge Clément Kalsa se font face et se répondent dans un livre d'art à deux entrées, avec deux sens de lecture.
Dans la pièce de Clément Kalsa, une mère lutte pour protéger ses enfants d'un prédateur. Ou, du moins, c'est la version qu'elle veut faire entendre : à ses enfants, au public, à elle-même. En face, l'intensité et la nervosité du trait de Julien Spianti, creusent d'innombrables sillons, comme le ferait un graveur, qui laissent apparaître ce que Thomas Ostermeier nomme une « orgie d'absence de sens ».
Fruit d'une amitié et d'une affinité artistique, SUTURE fait apparaître la source commune à laquelle puisent les deux oeuvres : la tentative de répondre aux questions que posent le désir et la fascination devant cette même douloureuse absence de réponse. -
En 1935, l'année de création d'Ivan Vassilievitch, Staline étendait la peine capitale aux enfants de douze ans après avoir interdit tout recours contre les sentences de mort prononcées par les juridictions spéciales du NKVD - la police d'État. C'est avec ce repère historique en tête qu'il faut lire Ivan Vassilievitch. Alors on goûte mieux l'insolence formidable et l'humour dévastateur de cette pièce en trois actes, pleine de rebondissements, de quiproquo et de coups de théâtre. Hélas, catalogué de petit-bourgeois réactionnaire, Boulgakov ne verra jamais monter son oeuvre théâtrale, ni publier ses romans. La censure savait ce qu'elle faisait : nul doute que cette pièce aurait connu l'énorme succès que ses répétitions présageaient. Dans un décor familier à tous les soviétiques - un appartement communautaire - Timoféïev, un savant fou a mis au point une machine à faire tomber les cloisons du temps et de l'espace. Son déclenchement met en scène Ivan le Terrible en même temps que le terrible Ivan, syndic de l'immeuble qui, s'il porte le même nom que le tsar, lui ressemble aussi comme un jumeau. Sur le principe des poupées russes, ce vaudeville truculent et sarcastique cache une satire du pouvoir, qui dévoile à son tour celle de la société moscovite, puis de l'intelligentsia de l'époque.
Le génie satirique de Boulgakov est tel, que la machine de Timofeïev se met en marche pour chaque lecteur, quels que soient le monde, l'époque, et la société qu'il habite. Il ne peut plus alors que pleurer...
De rire.
Christiane Rancé
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Les vingt-cinq poèmes écrits entre 1894 et 1939 et ici présentés ne sont que des gouttes d'eau dans une oeuvre océanique, mais dans chacune de ces gouttes diversement colorées se reflète le génie poétique du « Seigneur du Soleil » . De facture et d'atmosphère très différentes, comme si les uns étaient signés Rabi (son petit nom d'enfant) et les autres Rabîndranâth - en particulier les poèmes qui invitent le plus à la méditation, « Le Ferry », « Détachement », « Hic et nunc » ou « Un monde sans murs » - ils sont destinés aux grandes personnes à partir de huit ans, mettons, soit aux enfants comme aux adultes qui, dirait Bernanos, n'ont pas « mal tourné », parce que restés fidèles à l'enfant qu'ils furent. Certains trouveront peut-être quelques poèmes mélancoliques, voire tragiques - ain- si, « Le serviteur » - mais Tagore, qui prenait les enfants très au sérieux , jugeait nécessaire qu'ils n'ignorent pas les obscurités du réel, la finitude et la mort. Ce qui ne l'a certes pas empêché de rester toute sa vie Rabi le brigand, prompt à se délecter de tout ce qui est bizarre, saugrenu ou farfelu, voire délicieusement inquiétant : en dépit de ses lourdes responsabilités et de son statut d'homme public, à tout âge, et comme bien peu, il a su regarder le monde à hauteur d'enfant.
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Ce premier recueil de poèmes de la romancière Gaëlle Fonlupt est bâti en cinq parties, chacune ayant pour titre un verset du Cantique des Cantiques, qui reste sans doute le poème amoureux le plus universel : « A son ombre, en désir je me suis assise », « Chacun son glaive sur la cuisse, prêts aux affrontements de la nuit », « Où sera ton repos à l'heure de midi ? », « J'ai cherché celui que mon coeur aime », « Place-moi comme un sceau sur ton coeur ». L'ensemble constitue une forme de journal amoureux d'une année chaotique. La poésie de Gaëlle Fonlupt explore chacune des expériences fortes de la rencontre amoureuse. Chaque poème dit tour à tour la découverte, le mystère de l'inconnu aimé, l'attente douloureuse, mais aussi la colère et la crainte de l'abandon. L'apaisement et la plénitude n'en sont pas pour autant absents, entre les moments de trouble et d'incertitude.
Doté d'une solide charpente sonore et rythmique, le lyrisme de Gaëlle Fonlupt renouvelle le domaine de la poésie amoureuse, puisant aussi bien chez Bukowski (cf le poème Bu(c)k) que chez Anna Akhmatova ou Sylvia Plath.
Une nouvelle voix prometteuse, d'autant que les 80 poèmes de ce premier recueil ont été choisis parmi un ensemble de plus de deux cents. -
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