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Ricardo Menéndez Salmón
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N'entre pas docilement dans cette nuit paisible
Ricardo Menéndez Salmón
- Editions Do
- 21 Mars 2024
- 9791095434511
"N'entre pas docilement dans cette nuit paisible" tente de reconstruire une existence qui avance vers la maturité, celle de l'écrivain, à travers une existence qui s'est épuisée sans remède, celle de son père. Comme Philip Roth dans "Patrimoine", Amoz Oz dans "Une histoire d'amour et de ténèbres", Ricardo Menéndez Salmón explore l'histoire familiale pour se comprendre à partir des zones d'ombre et de lumière paternelles.
Le résultat est un texte qui traverse les domaines de l'héroïsme et de la misère, de la bonté et du mépris, de la joie et de la maladie, et qui livre un document d'une émotion contenue et d'une brûlante honnêteté. -
Dans un monde où, à force d'être pervertis, les mots ont perdu leur sens, les enfants se sont emparés du pouvoir et ont instauré le silence comme norme. En même temps que cette obligation, ils ont créé une religion de l'image, matérialisée par un dispositif monumental qui émet sans répit des stimuli visuels, et ils persécutent toute manifestation verbale ou écrite. Dans cette réalité sourde et muette, quelqu'un appelé IL (il n'y a pas de noms propres dans cette fable) tente de trouver un sens à l'existence, protégé par trois singuliers compagnons : un livre, un singe et le rire. Ricardo Menéndez Salmón concentre dans ce roman les grands thèmes qui ont marqué son oeuvre tout au long des années, comme la perte du sens du discours collectif, la mort de la parole, le legs que nous transmettons à ceux qui nous survivent, et la façon dont la technologie nous transforme et nous change en une autre espèce d'humains. Intense, stimulante et impeccablement écrite, Horde est une parabole qui, comme telle, aspire à contenir une leçon morale. Né en 1971 à Gijón où il vit, Ricardo Menéndez Salmón est considéré comme un des écrivains les plus remarquables de la littérature espagnole contemporaine. Si une grande partie de son oeuvre a été publiée en France aux éditions Actes Sud et Jacqueline Chambon, La Nuit féroce a paru aux éditions do en 2020.
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Dans des villages espagnols des années 30, trop isolés pour qu´un instituteur y fût nommé, les maîtres d´école étaient recrutés par des villageois au moment des foires. Ils avaient un salaire mais prenaient leurs repas chez les habitants qui les recevaient à tour de rôle. On les appelait catapote, « pique-au-pot ». La Nuit féroce se déroule à cette époque, dans un de ces villages au nom étrange. Le maître d´école est invité à partager une table dans une des maisons du lieu. Mais le terrible meurtre d´une jeune fille fige cette scène et libère la brutalité qui sous-tend ce bourg perdu lorsqu´un groupe d´hommes part à la chasse au meurtrier. Deux innocents fuient, bientôt persécutés par la colère aveugle. Un mal profond, enraciné dans le passé, irréfutable et impassible, gouverne le temps et l´espace dans ce conte noir et métaphysique aux résonances de tragédie grecque.
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Le jeune Kurt Crûwell semble destiné à une paisible vie provinciale jusqu'à ce 1er septembre 1939 où l'un de ses compatriotes, nommé Hitler, fond sur Dantzig.
Enrôlé sous les drapeaux, il assiste au martyre d'un village français et sitôt perd toute sensibilité. En réponse à l'absurde, il suspend les liens avec la réalité : ne plus rien ressentir, n'appréhender le monde que par l'imagination et la mémoire, devenir une créature purement mentale. Près d'une décennie plus tard, installé à Londres avec une infirmière de guerre devenue son épouse, il lui semble approcher d'une existence apparemment normale quand trois hommes réactivent le passé.
Comme subjugué à nouveau par le mal, il les suit jusqu'à l'écran de projection du salon cossu d'une demeure victorienne. Le voici encore spectateur du carnage et la vie se joue en une larme. Mais une larme, fût-elle versée ou bue, peut-elle sauver quiconque de l'enfer ? Peinture aux accents bibliques, tragédie en prose, série d'aventures et histoire d'amour, L'Offense nous plonge au coeur des ténèbres de l'âme humaine.
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Une passion (la philosophie), une atmosphère (l'hiver), un génie (Spinoza). Avec ces trois entités, Ricardo Ménendez Salmón tresse l'existence grise d'un érudit espagnol qui enterre ses illusions à Amsterdam et celle de Spinoza qui aima et mourut dans cette même ville. Un récit précieux, brillant et rare.
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Un correcteur reconstruit sur le papier la journée du 11 mars 2004, au cours de laquelle l'Espagne a été touchée par des attentats sanglants. Où Ricardo Menéndez Salmón réaffirme le rôle de l'écrivain dans l'interprétation des événements du monde actuel. Le 11 mars 2004, à Madrid, des bombes explosent dans quatre trains de banlieue qui emmènent les gens au travail. Il y aura cent quatre-vingt-onze morts et un très grand nombre de blessés. Ce matin-là, Vladimir, écrivain raté et correcteur de profession, travaille sur une traduction des Démons de Dostoïevski quand son éditeur l'appelle de Madrid pour lui annoncer ce nouvel acte de terrorisme perpétré par l'eta. Car personne n'en doute, ni sa mère, ni son père, ni son ami intime : il s'agit bien d'un nouvel attentat de l'eta, ce que José Maria Aznar s'empresse de confirmer. Refusant de céder à la sidération qui semble saisir l'Espagne, le correcteur cherche un secours dans l'analyse critique, considérant l'événement sous tous ses aspects. Pour lui, il est évident que ce crime ne peut pas être attribué à l'eta. Les détails ne concordent pas, et un littéraire, contrairement à un politique, sait que la vérité se cache dans les détails. Pour cela, il doit commencer par lutter contre l'émotion dévastatrice par laquelle «cinquante millions d'Africains mourant du sida nous font soupirer mais cent quatre-vingt-onze morts espagnols nous touchent autant que s'ils étaient allongés là, dans le salon». Il cherche aussi à fuir la réalité en prenant exemple sur sa femme, Zoé, restauratrice d'oeuvres d'art, qui peut passer des semaines entières concentrée sur quinze centimètres carrés de peinture. Il se réfugie ainsi dans son travail mais Stravoguine le ramène vite à l'horreur du présent. Par petites touches, le livre dessine une sorte de Weltanschauung (vision du monde) du correcteur qui sait par exemple que «dans chaque minute de la vie se cache une petite coquille qui cherche à passer inaperçue» et qu'il peut éliminer beaucoup d'erreurs mais qu'il est impuissant devant ce 11 Mars, «une erreur ineffaçable inscrite sur le livre de la réalité». Ricardo Menéndez Salmón se plaît à mettre en avant le rôle de l'écrivain dans la société actuelle. Le charme, l'ironie, l'émotion de ses livres ne cèdent en rien à l'esprit critique. Il est de plus en plus proche d'un Villa Matas, d'un Michon ou d'un Sebald.
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Prohaska, artiste allemand invisible, photographie et filme les images les plus insoutenables des horreurs du Troisième Reich et plus tard les massacres et désastres dont le monde n'est pas avare : enfants morts de faim en Extrémadure au temps du franquisme, carnages sous les dictatures d'Amérique du Sud. Mais l'art peut-il aller si loin, ne devient-il pas un complice du mal en s'en faisant le témoin, et dans l'effroi que suscite la vision de l'insoutenable n'y a-t-il pas une part de voyeurisme voire d'obscures jouissances ?
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Dans un futur que l'auteur nomme "Nouvelle Histoire", notre monde s'est réduit à un archipel où vivent les "Originels" et d'où sont exclus les "Étrangers". Le Narrateur est chargé de surveiller la station météorologique de l'île Réalité et, plus encore, d'interdire à tout bateau étranger d'accoster, sous le contrôle d'une entité, dont on ne sait si elle est physique ou symbolique. Il connaîtra deux autres sortes de contrôle : l'Académie du Rêve, un paradis artificiel chimique, et Aurora, un lieu métaphysique qui lui apprendra l'importance du jeu.
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La lumière est plus ancienne que l'amour
Ricardo Menéndez Salmón
- Jacqueline Chambon
- 1 Septembre 2012
- 9782330009342
Un lundi de 1348, alors que l'Europe sort de la peste noire, le futur pape Grégoire XI vient exiger du peintre toscan Adriano de Robertis qu'il détruise sa dernière oeuvre, la blasphématoire Vierge barbue. Le 25 février 1970, le peintre américain Mark Rothko se tranche les veines dans son atelier de New York. Et le 11 septembre 2001, alors que se profile une crise mondiale, le peintre russe Vsévolod Semiasin écrit une lettre dans laquelle il révèle les raisons de son geste fou : manger la toile qu'il vient d'achever.
L'histoire de ces trois maîtres, dont la base est l'énigme de cette Vierge barbue, pose une question essentielle : celle du pouvoir de l'art. Chacun de ces récits consacrés à un peintre résonne avec trois moments cruciaux de la vie du narrateur, Bocanegra. Ainsi, l'impossibilité devant laquelle se trouve Adriano de Robertis de décrire l'horreur de la peste n'est pas sans lien avec le renoncement du jeune Bocanegra à décrire la réalité. De même, le suicide de Rothko qui se heurte à l'impuissance de l'art renvoie à Bocanegra, incapable d'écrire pendant l'agonie de sa femme. Il existe enfin un vrai parallélisme entre le discours de l'écrivain recevant le prix Nobel et la lettre testamentaire du peintre Semiasin, devenu fou.
Dans la lignée des Onze de Michon et d'auteurs comme Félix de Azua ou Vila-Matas, proche par sa thématique du Chef-d'oeuvre inconnu de Balzac, La Lumière est plus vieille que l'amour - traduction de la formule latine (Lux antiquior amore) que le peintre Adriano de Robertis inscrit dans l'angle de La Vierge barbue - dépasse le roman et fonctionne comme une oeuvre d'art toujours plus riche que les interprétations qu'on peut en faire. Ses fulgurances intellectuelles, romanesques ou confidentielles en font un bonheur de lecture.
Grâce à la subtilité de la construction des récits, les questionnements et les moments d'intimité s'emboîtent, fonctionnent ensemble pour former ce moderne avatar du roman, sorte de méta-roman qui représente ce qui se fait de plus novateur en ce moment en littérature.