Saisir l'insulte dans la multitude de ses manifestations, qu'elles impliquent jeu, joute ou guerre, a été le point de départ des nombreux regards croisés qui constituent cette réflexion collective : linguistes, littéraires, philosophe, historiens, juristes présentent leur point de vue sur un phénomène qui fait couler beaucoup d'encre et peut mener son auteur tout droit au poste. Au croisement de disciplines qui interrogent avec leurs outils et leurs méthodes ce « petit » fait de langue aux conséquences parfois extrêmes, nous avons souhaité proposer des lectures multiples qui allient recherche de fond et applications, alors que la demande sociale devient toujours plus pressante. Du Moyen Âge à la trash radio québécoise, en passant par les tribunaux de jadis et naguère, les cours de récré, l'arène des guerres de religion ou les lettres de haine, cette exploration des fonctions, fonctionnements, modalités et circulation du dire insultant vise à compléter la grille de lecture de cet acte de langage omniprésent et pourtant tabou.
Si la linguistique de corpus a vu, grâce aux nouvelles technologies notamment, s'accroître son champ et son influence depuis une dizaine d'années, nombreux sont encore les domaines qui pourraient tirer des bénéfices non négligeables de ces approches méthodologiques novatrices. Nous en avons choisi deux qui nous paraissent, en temps que diachroniciens, particulièrement centrales et pourtant délaissées : la traduction et l'étude du discours envisagé dans le cadre de la variation.
Toutes les études réunies en ces pages se posent la question du traitement des données regroupées en corpus, qu'il s'agisse de passer d'une langue à l'autre, comme avec la traduction, ou d'une variété à une autre (que ce soit dans le cadre de la variation diatopique, diaphasique, diastratique ou diachronique) ; se pose aussi la question du type de discours envisagé, qui peut ou non conditionner à son tour ces différents niveaux d'analyse.