Sciences sociales / Société
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LA TENTATION DE PENELOPE Belinda Cannone Janvier 2010, 2010 pagesQu'est-ce que se sentir femme aujourd'hui ? L'opinion commune, fondée sur la différence des sexes, postule l'existence d'une « nature féminine » liée à la capacité d'enfanter. Contre cette conception régressive, cet essai percutant appelle à ne pas défaire ce que les générations précédentes avaient conquis : à résister à la tentation de Pénélope. Car c'est à partir d'une féminité réellement vécue qu'un féminisme qui ne serait ni abstrait ni belliqueux est ici envisagé.
J'ai placé le désir au centre du livre : c'est parce que nous aimons les hommes et les désirons que nous cherchons les moyens de mieux vivre ensemble. J'ai placé la liberté comme moteur et comme horizon : contre les revendications identitaires, elle seule permet de travailler à se dégager des vieux modèles et des préjugés, pour pouvoir réinventer sans cesse nos vies. L'essai est bâti sur trois modes tressés : l'implication personnelle (car de quel surplomb pourrais-je parler d'une question aussi intime qu'elle est partagée ?) ; la réflexion autour des représentations (toujours historiques) de la différence des sexes, des genres et de la sexualité ; et la discussion de certains travaux féministes récents. Trente-six brefs chapitres évoquent le cerveau des femmes, l'aliénation, la politique, la beauté des hommes, le non-désir d'enfant, la possibilité de la suspension des genres, la prostitution, etc.
Livre modeste parce qu'il est écrit sur le mode du « pour l'instant » : demain nous réserve tant de surprises. Livre d'optimisme parce que l'égalité est en marche, inexorable, si nous ne la ralentissons pas nous-mêmes. Livre d'engagement enfin parce que, traquant les représentations qui nuisent à l'émancipation et essayant d'imaginer les chemins de l'égalité, il déploie quelques profondes convictions.
Belinda Cannone -
Nous avons tous constaté que bien des gens dont nous respectons l'intelligence s'en servent... bêtement. Camus ne disait-il pas qu'il y a deux sortes d'intelligences, l'intelligence intelligente et l'intelligence bête ? Cette dernière produit une pensée uniformisée dont nous voyons les traces partout. Mais il n'est pas si facile de décrire ce phénomène de conformisme dans sa version actuelle.
Il ne s'agit donc pas dans cet essai d'incriminer une nouvelle fois la sottise dans sa large existence mais l'opinion des gens éclairés, ceux qui, ayant le temps et les moyens de s'informer et de se cultiver, sont pourtant victimes du préjugé et du lieu commun, qu'ils contribuent à distiller dans l'opinion contemporaine. Paresse, réduction, relativisme, recours à des idées intelligentes mais périmées... : il faut comprendre les mécanismes de cette butée de l'esprit qui fait qu'une pensée sophistiquée et en apparence libre s'applique parfois mécaniquement.
En 36 brefs chapitres, La bêtise s'améliore aborde l'amour, la politique, l'économie, l'art, la morale, l'école, la langue, le désir, le bonheur... Cet essai, dont un modèle pourrait être Le Neveu de Rameau de Diderot, met en scène le dialogue de trois personnages : Gulliver, l'homme en colère qui est le moteur de cette réflexion, son ami le narrateur, indulgent et curieux, et Clara, la fiancée du narrateur, qui tire plutôt la réflexion vers la philosophie morale.
Il n'y a pas de remède au conformisme, il s'agit juste de se montrer toujours vigilant et La bêtise s'améliore veut y contribuer en étant un appel à la responsabilité intellectuelle. D'abord éloge de la liberté d'esprit, il aimerait nous mettre en garde contre la pétrification de la pensée qui nous menace à tout moment.